L’Ecosse, le Brexit
et les élections du 8 juin 2017 – DW
Mélissa Chemam, en reportage d’Edimbourg, pour Deutsche Welle.
L'audio est en ligne depuis samedi - pour écouter :
http://www.dw.com/fr/salut-la-terre/av-39188686
En parallèle, le texte :
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En parallèle, le texte :
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Les
Britanniques votent (encore) pour renouveler leur Parlement ce jeudi 8 juin,
dans une ambiance post-Brexit particulièrement tendue, aggravée par une série
d’attentat (à Manchester fin mai puis près du London Bridge dans la capitale).
Alors que le pays est plus divisé que jamais sur son avenir, les partis
politiques tentent de redistribuer leurs cartes. Mais au-delà de ces élections
nationales, pour l’Ecosse, région déjà semi-autonome et surtout très
pro-européenne, un avenir au sein de l’Union européenne compte désormais plus
qu’au sein du Royaume-Uni. Rappelons que dans cette région, 62% des électeurs
ont voté contre le Brexit.
Reportage à Edinburgh de Mélissa Chemam
Reportage à Edinburgh de Mélissa Chemam
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Dans le quartier de Leith, du nord d’Edimbourg, ces
militants du SNP, le Parti national écossais, trient leurs outils de campagne.
Ce quartier du nord de la capitale écossaise comprend les
anciens docks et a longtemps voté pour les travaillistes. Mais depuis une
dizaine d’années, le soutien au Labour Party s’est effondré. Pour
Jane, Phil et Katie, le Scottish National Party incarne désormais la vraie
gauche alternative…
Katie
– « seul le SNP peut se battre pour nous, vous voyez, notamment sur le
plan international, en Europe mais aussi à Londres, c’est là que les Ecossais
en ont le plus besoin ! C’est pour cela que nous sommes là. N’est-ce
pas ? Nous voulons nous faire entendre ».
La première ministre écossaise,
Nicola Sturgeon, leader du SNP, ne défend pas seulement le projet
d’indépendance de l’Ecosse, elle attaque les conservateurs sur le terrain
économique et s’oppose à leur politique d’austérité. Face au choix du Brexit,
pour Phil, le SNP est indispensable.
Phil
– « Je ne pense pas que les Britanniques ont compris pourquoi ils
votaient. La campagne a été tellement mensongère. Beaucoup de gens n’ont pas
compris les conséquences liées à ce vote. C’est vraiment embarrassant. Je me
sens honteux parfois d’être britannique, même si je me sens plus écossais que
britannique. Je pense que la plupart des Britanniques sont aussi embarrassés
par ce choix que les Américains par Trump ! Cette décision n’a aucun sens,
à aucun niveau ».
Et selon Jeremy Valentine, enseignant en études culturelles
à l’Université Queen Margaret, un Anglais installé à Edimbourg depuis 2000, personne
n’a vraiment anticipé en Angleterre qu’un oui au Brexit encouragerait les
Ecossais à demander de nouveau leur indépendance…
Jeremy Valentine « Si les gens votaient de manière rationnelle, ils
auraient pensé à cela, mais je ne pense pas qu’en votant pour le Brexit les
Britanniques ont anticipé les conséquences internes pour le Royaume-Uni !
L’indépendance de l’Ecosse a été rejetée en 2014 par référendum donc le sujet a
été mis de côté. Les électeurs ont voté pour le Brexit en exprimant leur avis
sur le coût des gouvernements, britannique et européens, pour dire quelle part
de leurs taxes doit servir à payer les administrations et toute cette
bureaucratie. Et le scepticisme domine quand on parle de gouvernements et
d’hommes politiques ».
Par contre, selon Gordon Guthrie, auteur d’un livre sur
l’avenir de l’Ecosse, personne ne pouvait imaginer le Brexit depuis des villes
comme Glasgow ou Dundee. Il explique le choix du Brexit par une nostalgie de
l’empire chez de nombreux Anglais… Et face à un royaume brisé, les Ecossais
n’ont pour lui qu’une option : se reconstruire seul, et avec l’Union européenne.
Gordon Guthrie – « Ce qui se passe en Ecosse est une conséquence des
échecs du gouvernement de Westminster. Le Royaume-Uni a longtemps vécu avec
l’idée qu’il dominait le monde, et ce n’est plus le cas. Bien sûr, cela reste
un bon endroit pour vivre, nous avons un excellent niveau de vie, une culture
très riche, mais les institutions politiques sont vraiment endommagées. Nous ne
sommes pas plus faibles mais le reste du monde a changé et gagné en
puissance ».
Si les Anglais voient souvent l’Union européenne comme une
bureaucratie anti-démocratique, pour les Ecossais, l’Europe représente au
contraire des garanties pour l’environnement et les droits sociaux.
Katie : Quant on
voit le rejet actuel de l’accord de Paris sur le climat, nous en Ecosse sommes
pour les énergies renouvelables, c’est ce que nous développons ici. Et Theresa
May est la seule dirigeant à ne pas avoir condamné le choix de Donald Trump de
s’en retirer, contrairement à Merkel et Macron, j’ai honte d’entendre ça. Je ne
veux rien avoir à faire avec ce genre de point de vue. L’Ecosse a voté
largement pour rester dans l’Europe. Nous nous voyons d’abord comme européennes
avant d’être britanniques. Pas tout le monde mais la plupart des Ecossais. Pour
nous, il ne s’agit pas que du Brexit en plus, il s’agit de défendre nos
valeurs : comme une redistribution décente des richesses du pays. Et je
pense que c’est ce qui nous rapproche ».
Difficile de prédire si la route vers l’indépendance et une
entrée dans l’UE de l’Ecosse sera rapide ou même possible, mais pour une large
majorité des Ecossais, c’est donc désormais une priorité. Bien plus que les
élections à Westminster.
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