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Pathway To Paris : Musique et politique pour le climat
Note de la rédaction :
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Mélissa
Chemam
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Quelle belle idée ont eu Jesse Paris Smith et Rebecca Foon. Toutes deux
sont musiciennes, Jesse est la fille de l’une des plus grandes chanteuses de
l’histoire des Etats-Unis, Patti Smith. Rebecca est une chanteuse, compositrice
et instrumentiste canadienne de 36 ans. Elles ont travaillé pendant un an, avec
l’organisation 350.org, à l’élaboration de Pathway To Paris, une plateforme
devant réunir penseurs et artistes en marge de la conférence des Nations Unies
sur le changement climatique, ce mois de décembre 2015.
Pendant deux soirs, Pathway To Paris a réuni de grands noms
du militantisme au service de l’information des citoyens sur le climat dont la
journaliste canadienne Naomi Klein, auteur de No Logo (publié en 2002) et La
Stratégie du choc (2008), le militant et auteur américain Bill McKibben, et
parmi les plus grands musiciens de la scène rock mondiale.
Pour donner à leur événement un pouvoir de conviction
universaliste, Jesse et Rebecca ont choisi d’organiser deux concerts, les 4 et
5 décembre, avec la participation d’artistes engagés, au Trianon dans le nord
de la capitale. C’est pour ce beau projet qu’elles ont réussi à réunir les plus
puissants noms de la musique tout en s’assurant que la soirée laisserait place
aux discours et à la conviction. Le pari est grandement réussi. Sur scène sont
donc annoncés le musicien tibétain Tenzin Choegyal, le chanteur congolais Fally
Ipupa, le bassiste américain Flea, membre du groupe Red Hot Chili Peppers qui
multiplient les projets depuis une décennie, et enfin la grande chanteuse folk
/ rock américaine Patti Smith et l’un des chanteurs britanniques les plus doués
de sa génération, Thom Yorke, leader du groupe Radiohead.
Soirée
inoubliable, et expression de convictions
La soirée débute avec un poème lu par Patti Smith, dont les
talents d’écrivain sont bien connus, accompagnée au piano par sa fille et au
violoncelle par Rebecca Foon, dans un grand élan d’émotion. Son poème sur la
nature égraine tout ce que celle-ci a de beau et de puissant et conclut ‘Nature is… Simplicity’. Entre ensuite en
scène Tenzin Choegyal qui joue avec Jesse au piano une prière bouddhiste. Il
est ensuite rejoint par Flea à la guitare basse.
Avant de passer à la performance suivante, un homme d’affaire
de San Francisco vient partager son expérience. Ami de longue date de Bill
McKibben, il a abandonné son activité pour se consacrer au développement des
énergies renouvelables, dans cette ville de Californie sensible au sujet. Il
nous invite à répéter : « I
believe that we will win »… tous en chœur, « je pense que nous
allons y arriver ».
Bill
McKibben, quant à lui, a un message très clair à faire passer alors que tout le
samedi après-midi, il a organisé à Montreuil un « procès » de la
compagnie pétrolière américaine Exxon Mobil. Une enquête de journalistes
américains a en effet prouvé récemment que la compagnie savait depuis 25 ans
que l’exploitation et la surconsommation d’hydrocarbures mèneraient à une
catastrophe environnementale, mais n’en a rien dit. « Exxon Knew! »
répète Bill, qui revêt même une chemise sur laquelle est inscrit ce slogan pour
l’ocassion, avant de laisser la place au concert suivant, celui de Fally Ipupa.
Le
musicien congolais interprète deux titres dont l’un de rumba congolaise, accompagné
d’un deuxième guitariste. Patti Smitth introduit alors Flea, qui joue entre
basse et ‘looper’, ou pédale de boucle, qui enregistre et répète un accord. Il
est accompagné par le violoniste et flûtiste australien Warren Ellis, qui a
longtemps joué avec Nick Cave and The Bad Seeds. Ensemble ils offrent une
performance électrique et transcendante.
Le message de Naomi Klein :
« Tout peut encore changer »
C’est
alors à Naomie Klein de prendre la parole dans un des grands moments de la
soirée. Particulièrement optimiste malgré une description alarmiste des
inégalités mondiales, elle encourage chacun d’entre nous à devenir acteur d’une
changement global, plus convaincante que jamais. Cette année 2015, Naomi Klein a
également publié Tout peut changer :
Capitalisme et changement climatique,
un essai édité en France chez Actes Sud qui souligne que « notre modèle
économique est en guerre contre la vie sur Terre », et qu’il ne faut pas
tarder à y remédier. Noami annonce d’ailleurs l’organisation d’une prochaine
journée d’action, le 12 décembre, à partir de 12 heures, dernière journée de
négociation des délégués réunis pour la COP21 au Bourget. Cette action
citoyenne aura lieu ici à Paris ; les détails seront annoncés
prochainement sur le site dédié au rendez-vous : http://d12.paris/.
C’est
alors au tour de Patti Smith d’occuper la scène. Quel charisme, quelle voix,
quelle parolière… Patti commence son set
par une chanson composée pour sa fille, Jessy, dont le deuxième prénom a été
choisi par amour pour notre capitale… Elle enchaine ensuite deux de ses plus
grands tubes - ‘People Have the Power’,
répète-elle, ovationnée, et un titre inédit, composé avec Flea pour Lola,
disparue à Paris le 13 novembre dernier. Elle reprend enfin le ‘Imagine’ de
John Lennon, chaussant ses lunettes et sortant une feuille blanche pour lire
les paroles, l’émotion est à son paroxysme.
La musique comme discours le plus
puissant
‘Don’t forget it, use your voice’ :
vous avez le pouvoir, ne l’oubliez pas », conclut Patti Smith,
« utilisez votre voix ! ». Un message d’autant plus fort en ces temps
où les manifestations sont interdites en France pour cause d’état d’urgence et
où l’on vote ce dimanche et dans deux semaines pour un scrutin régional qui
s’annonce délicat.
Après
l’intervention de l’activiste indienne Vandana Shiva, c’est au tour du très
attendu Thom Yorke d’entrer en scène pour clore cette soirée. Chanteur,
compositeur, guitariste et pianiste, Thom Yorke est un concert à lui tout seul.
Il entame son set par un nouveau morceau de son groupe Radiohead intitulé
‘Silent Spring’, interprété à la guitare folk. Les paroles sont emplies de
références à la nature – ‘See the moon
smiling’, ‘the reign of butterfly’,
‘broken flowers’, et à la résistance
à un système destructeur : ‘the
future… is not somewhere else’, ‘people have the power’, ‘we’ll take back what is ours, one day at a time’… Un texte
particulièrement adapté à son combat, ce à quoi il était loin d’avoir habitué
son public. Mais l’on sait désormais qu’il est un grand admirateur de Bill
McKibben ; ses textes l’ont peut-être inspiré…
Thom
Yorke enchaîne avec une surprise : la chanson ‘Fake Plastic Tree’, extraite
du deuxième album de Radiohead, The Bends,
datant de 1995, et poursuit avec le sublime titre ‘Bloom’, extrait du dernier
album du groupe, The Kings of Limbs,
sorti en 2011, qu’il chante en s’accompagnant au piano, avec un looper
également. Il interprète ensuite une autre chanson inédite, ‘Desert Island Disk’,
avant d’être rejoint par Flea pour deux titres extraits de l’album Amok d’Atoms For Peace, une
‘supergroupe’ qu’ils ont formé ensemble en 2010. On sent à l’énergie et au
sourire constant du musicien d’Oxford qu’il passe un moment aussi paroxystique
que l’audience, désormais entièrement debout.
Tous
les musiciens reviendront ensuite sur scène, entourés des activistes, pour
reprendre en chœur les paroles de Patti Smith : ‘People Have The
Power !’, avant de nous donner rendez-vous le 12 décembre prochain. Ils
sont les mieux placés pour savoir que ce combat pour la « justice
climatique » est encore loin d’être gagné.
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Liens :
Thom Yorke le 4 déc. : https://www.youtube.com/watch?v=JgpyF6PDrEw
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