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[PORTRAIT] JUPITER, DES FAUBOURGS DE KINSHASA AUX SOMMETS DE HYDE PARK, ALLERS-RETOURS
11 juin 2015 Par
A 50 ans, Jupiter est un musicien comblé. Le 15 juin 2015, il partagera la scène du Zénith avec le groupe le plus célèbre du Royaume-Uni, Blur, et cette consécration internationale arrive après un parcours exemplaire mais non sans embûche pour le musicien congolais, né à Kinshasa, et élevé en partie à Berlin où son père était diplomate dans les années 1980. Depuis son retour en République Démocratique du Congo, ce percussionniste et chanteur s’est donné pour mission de faire revivre les centaines de traditions musicales ancestrales des quatre coins du pays, tout en leur apportant des influences glanées au cours de ses voyages plus récents.
Pour en savoir plus sur Jupiter, rendez-vous sur le blog Melissa on the Road.
Jupiter Bokondji voyage à présent avec son Okwess International Band, un groupe comprenant six musiciens, et est en tournée en France et en Europe. Après le 15 juin au Zénith, il sera à Hyde Park à Londres avec Blur dont le chanteur et leader charismatique, Damon Albarn, est devenu son ami à la suite de l’aventure Africa Express que Damon a mise sur pied à partir de 2005. Le projet a pour ambition de réunir sur une même scène des musiciens européens et africains, Damon se passionnant notamment pour les musiques malienne et congolaise. C’est ainsi qu’il a produit les disques d’Amadou et Mariam à Bamako et de Jupiter à Kinshasa.
Des rives du fleuve Congo au Berlin Est de la Guerre froide
Mais si Jupiter doit son succès international au musicien britannique, sa longue carrière a été forgée au prix de ses seuls efforts. Nous nous sommes rencontrés à Paris, à la frontière entre les 18ème et 19ème arrondissement, quelques jours avant le début de sa tournée française. Fin, grand et mystérieux, Jupiter est aussi chaleureux et esthète. Il parle d’une voix profonde, grave, imposante et inoubliable « Ma grand-mère était guérisseuse et je le voyais faire ses cérémonies en musique, elle utilisait les rythme pour guérir les malades ; je pense que j’ai en partie hérité de son don », explique Jupiter pour justifier son talent.
Son père, diplomate, lui a transmis la passion des affaires étrangères, des beaux costumes, de la mission politique, et si les rythmes du Congo ne l’avaient pas rattrapé il serait sûrement devenu bureaucrate. A Berlin, il a découvert la musique moderne occidentale, le rock, le jazz, la musique classique, venus des Etats-Unis et de Grande-Bretagne notamment. Et en rentrant à Kinshasa, il redécouvre les musiques traditionnelles de son pays. Au Zaïre – l’ancien nom de la RD Congo – dans les années 1960, 70 et 80, c’est la rumba congolaise qui règne sur les scènes, mais pour Jupiter, cette musique a fait son temps, et elle a été imposée par les colonisateurs. Lancé dans la musique avec un premier groupe à partir de 1983, à à peine 18 ans, Jean-Pierre, que tout le monde surnomme Jupiter depuis l’enfance du fait de son tempérament de feu, fonde Okwess en 1995 et sa version Internationale en 2003. Entre temps, il doit lutter pour faire exister le groupe, les financements sont inexistants à Kinshasa, les salles de concerts peu nombreuses, les possibilités d’enregistrer extrêmement limitées.
Au Congo, c’est l’Europe qui revient le chercher de nouveau
Son quotidien change lorsque deux Français, Renaud Barret and Florent de la Tullaye, viennent en 2004 tourner un film à Kin et réalise au final un documentaire sur sa musique : La Danse de Jupiter, sortie en 2006. A partir de 2010, le groupe, désormais plus connu, commence à enregistrer, a recours à des guitares électriques et pas seulement des instruments acoustiques et commence à partir en tournée : au Gabon, d’abord, puis en Europe : Belgique, Portugal, et le festival Back to Black à Londres. Jupiter est invité à rejoindre Africa Express en 2012, après avoir rencontrer Damon Albarn venu à Kinshasa pour enregistrer l’album Kinshasa One Two pour l’ONG Oxfam avec des musiciens anglais et locaux, sous le nom du super groupe DRC Music , sorti en novembre 2011. « Damon, c’est mon pote, on ne s’est pas rencontré par hasard. Lui comme moi aimons apprendre toujours plus de choses, les uns des autres, découvrir, c’est un génie ! ».
Coup sur coup, les mois qui suivent transforment la vie de Jupiter et son groupe : invités au festival WOMAD dans l’ouest de l’Angleterre, ils produisent un premier album qui sort au Royaume-Uni en 2013, Hotel Univers. L’été suivant, ils se produisent sur la scène de Glastonbury, dans la même région, l’un des festivals de musique les plus grands et prestigieux du monde.
Ce qui fait sa force et son succès, Jupiter Bokondji le sait, c’est son message : très politisé, il défend à la fois la culture de son pays, des pays africains, le besoin de démocratisation, un retour aux traditions et le droit à la modernité, tout en osant des textes forts et sans demi-mesure. Son superbe morceau intitulé sobrement ‘Congo’ a été ainsi choisi par le fondateur de Massive Attack, 3D, lui-même très engagé, pour son ‘’side project’’ intitulé Battlebox, en octobre 2013. Il y chante notamment « nos ancêtres étaient des esclaves, on les fouettait trois fois par jour mais ils bouffaient trois par jour (…) Cinquante ans plus tard, les Congolais bouffent une fois par jour (…) Est-ce qu’on est indépendant ou dépendant ? Ca dépend, l’histoire nous jugera ».
Depuis Jupiter et Okwess International ont produit un deuxième album, sur lequel Damon Albarn va enregistrer une partie de l’instrumentation au clavier. Il devrait sortir l’an prochain.
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Jupiter et Okwess International seront au Zénith le 15 juin prochain et le 20 juin à Hyde Park à Londres en première partie de Blur, le 26 juin au Point Ephémère, puis en tournée en Europe dont une date au Festival Roskilde au Danemark le 4 juillet avec Africa Express.
visuel : page facebook de Jupiter.
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