16/10/2013

ROCK IN JOHANNESBURG - L'article



 ROCK IN JOHANNESBURG
14 oct. 2013
Mélissa Chemam

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 Dans le cadre de la Saison sud-africaine en France, la Gaîté Lyrique a reçu quatre groupes de Johannesburg samedi 12 octobre, pour un concert consacré aux sons de la scène rock d’Afrique du Sud. Reportage avec Motèl Mari, The Brother Moves On, Desmond and the Tutus et BLK JKS.

Mélissa Chemam.
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Quatre groupes, deux nouveautés et deux valeurs sûres. Comme disaient eux-mêmes les musiciens sur scène, La Saison sud-africaine en France a ainsi présenté une affiche rare, impossible à réunir à Johannesburg !  Parmi les deux découvertes, Motèl Mari et The Brother Moves On, le premier groupe représente le mieux la mixité et les tendances nouvelles issues de la mégapole sud-africaine. Avec deux musiciens de Johannesburg, également membres de la formation BLK JKS, et un auteur-compositeur new-yorkais, Motèl Mari a créé une musique indéfinissable, empreinte de musique électronique et de lyrisme, tout en s’ancrant dans des rythmes africains…

Pour le compositeur, Joao Orecchia, c’est Johannesburg qui est le lien entre toutes ces influences :

‘On s’est rencontré à Johannesburg, nous le disions sur scène, nous sommes tous amis, je suis allé aux concerts de ces groupes et en parlant, on est devenus proches. Et puis je leur ai demandé de jouer sur mon dernier album solo et  ils ont commencé à m’accompagner sur scène. Et là j’ai senti que nous commencions à former un vrai groupe. Nous avons choisi le nom de Motèl Mari et sorti cet album, ‘Eternal Peasant’.’ 

Mais quand il s’agit de rentrer dans une catégorie, les musiciens bottent en touche…
Mpumelelo Mcata, guitariste de Motèl Mari et BLK JKS, autodidacte et pur produit de Johannesburg, reconnaît avoir des racines profondément africaines mais met en avant le côté universel de son travail musical  :

‘On vient de Johannesburg et on fait de la musique. Et nous faisons de toute évidence partie du ‘village global’, on court après les avions, on joue jusqu’à Paris, mais aussi à New York où nous sommes connus comme DJs, et puis en plus il y a l’internet…’

Joao ajoute qu’en tant que musiciens, la question de l’identité et l’origine ne se pose pas. Une évidence pour cet artiste de Brooklyn né d’un père italien et d’une mère péruvienne, installé à Johannesburg depuis 2004 :

‘Ce qu’il y a de spécial à Johannesburg, c’est que la ville commence à prendre sa place dans le monde parmi les autres grandes villes comme New York, Paris, Londres, et Pékin, et nous y avons accès à beaucoup de choses, d’influences, et nous n’avons pas a nous fermer à quoi que ce soit. Tout cela entre ici et nous influence sans que nous  y pensions spécialement et nous restons ouverts à toutes les influences’. 

Parmi les deux têtes d’affiche de cette soirée, on retrouve aussi le groupe de rock Desmond and the Tutus. Originaires de Pretoria, ces quatre musiciens afrikaners vivent et travaillent à Joburg depuis 8 ans et représentent la tendance indie-pop de cette jeune scène sud-africaine. 

Très présents sur les scènes sud-africaines, mais aussi en Europe et au Japon, ils sont connus aussi bien pour leur humour que pour leur nom inoubliable, comme l’explique le chanteur, Shane Durrant :

‘Notre nom, il vient d’abord de cette recette magique qui fait qu’on peut prendre un nom célèbre et le transformer en nom de groupe en ajoutant ‘et les’ entre le prénom et le nom ! On a longtemps cherché un nom, un soir, tous ensemble, et on a voté pour Desmond. Ca sonne bien, et cela nous a porté chance. Je ne dirais pas qu’on l’a choisi pour des raisons politiques, mais en y repensant, évidemment cela a une  connotation très importante pour nous. Desmond Tutu est un homme admirable, qui se bat pour ses valeurs et qui a beaucoup fait pour le pays, c’est une super référence pour nous’. 

Desmond and the Tutus, c’est le son rock de la soirée – qui a d’ailleurs influencé beaucoup d’autres groupes, comme The Brother Moves On, le troisième groupe invité…

Le guitariste de Desmond and the Tutus, Douglas Bower, reconnaît en cela que leur succès est dû à un mélange d’influences…

‘Nos références sont des musiciens comme Johnny Clegg, Michael Jackson –  si vous écoutez attentivement, vous  pouvez même l’imaginer sur scène en nous écoutant ! – on pense à James Brown et Franz Ferdinand, il y a beaucoup de références musicales’.

Tout comme Desmond and the Tutus, le groupe BLK JKS est très connu à Johannesburg. Ils jouent depuis dix ans déjà, et ont influencé un grand nombre des groupes qui montent en Afrique du Sud. Il semble donc incontournable pour une soirée consacrée au Rock sud-africain.

Pour Tshepong Ramoba, le batteur du groupe, qui fait aussi partie du projet Motèl Mari, les origines sud-africaines de sa musique sont cruciales :

Ce qui m’inspire par exemple, ce sont les histoires que ma grand-mère ou ma mère par exemple me racontaient. Etant d’Afrique du Sud, à notre âge surtout, ce sont nos parents qui ont connu l’apartheid, ils étaient jeunes dans les années 1970. Quand nous sommes nés, tout cela, nous sommes nés dedans, nos parents nous en parlaient et nous donnaient des conseils, et puis quand Mandela a été libéré, nous étions encore très jeunes. L’essentiel de notre vie, nous l’avons passé dans la Johannesburg ‘normale’, celle que nous connaissons aujourd’hui. Donc ce passé, malgré tout, nous ne le connaissons pas directement, nous n’étions pas là…’

Mais pour Mpumelelo Mcata aussi, ce passé à une grande importance, surtout en tant qu’artiste. Et c’est ce qui fait de la musique une affaire politique malgré elle en Afrique du Sud, selon lui…

Nos ancêtres et nos parents ont été connectés à un mouvement très spécial. Donc nous aussi. Et l’on devrait tous savoir qu’on a un rôle à jouer. Mais quand on ne s’implique pas, en politique par exemple, on s’implique quand même politiquement en refusant de s’impliquer, c’est toujours une décision politique. Le personnel devient ainsi politique. Et donc je pense que ce que nous faisons est toujours une déclaration politique, et peu importe qui nous sommes, il faut le reconnaître’.



Au bout de quatre heures de musique live, les quatre groupes reprendront donc des routes différentes, vers l’Europe et l’Afrique australe, en espérant tous se retrouver enfin un jour sur la même scène à Johannesburg.

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Et le lien du reportage dans LA BANDE PASSANTE sur RFI :  http://www.rfi.fr/emission/20131015-1-nasser



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