08/07/2013

"Mon vieux, tu savais que le verbe cristallisait la pensée ?"


FAUVE - 'Cock Music Smart Music'







Cock Music
 Smart Music / Rag #1 - Fauve



Je revois encore Dan m'expliquer sa théorie en s'agrippant fermement l'entrejambe
Il me disait comme ça avec cet accent que je t'épargne
« Il faut distinguer le cock music et le smart music tu vois,
Rolling Stones Pixies AC/DC Guns ‘n’ Roses etc.
C'est une question de génération mon petit gars »

OK il a peut-être raison je sais pas
Il y a quelque chose d'ironique dans tout ça
Comme si une fois le Big Magnet s’était dit
« Tiens Pierrot amène-toi qu’on rigole Tiens tu le vois l'autre taré en bas ? Et bien moi j’ai décidé que pour les cent prochaines années il avancera les yeux bandés »
Et Pierre de répliquer
« Seigneur soyez pas pute laissez-lui au moins des indices par-ci par-là j’en sais rien »
Et il en fut ainsi

Depuis jour et nuit je traque les épiphanies
Avec la rage d’un mercenaire sous crack
D’un alcoolique en manque de Jack
D’un dément
D’un amant qu’on plaque
Jour et nuit je traque les épiphanies
Avec la rage d’un mercenaire sous crack
D’un alcoolique en manque de Jack
D’un amant qu’on plaque
D’un dément qu’on claque

Je revois encore Matthieu et les étoiles dans ses yeux entre deux cigarettes fumées à la fenêtre de ma chambre il me disait comme ça
« Mon vieux tu savais que le verbe cristallisait la pensée ?
Je te jure un mot sur une idée foireuse c'est exactement comme un baiser
T'as pas remarqué ?
C'est une question de perception »

Et au fond je sais qu'il a raison
Il y a quelque chose de mystique dans son affaire
Pouvoir ramasser les mots par terre et les jeter comme des pierres
Contre les parois plongées dans le noir pour en faire sortir les choses qui blessent
Grâce à la parole réussir à s'armer contre les sales pensées et faire des plans Serrer les poings serrer les dents les cogner leur rentrer dedans
Essayer d'attraper les syllabes à la volée pour en faire des bougies qui éclairent et qu’on placera sous les paupières
Ou des jolis bouquets pour une fille qui nous plaît
Finalement c’est pour ça que j’écris

Je revois encore Thibault éclairé par le halo de la lampe à pétrole
Il me disait comme ça entre les vapeurs d'alcool
« Tu sais qu'on peut flotter au-dessus du sol rien qu'avec la parole ?
Je te jure On faisait ça quand j'étais enfant Sur le terrain vague derrière chez mes parents
C'est juste une question de conviction »

Et je prie pour qu'il ait raison
Il y a quelque chose de magnifique dans son histoire
De savoir que si tout foire il nous en reste dans les tiroirs
Grâce à eux qui ont reçu le feu sacré qui permet de tout voir
Eux les machines à observer Les machines à mettre des mots sur tout
Eux qui écrivent plus vite que la pensée
Et avec ça ils agrandissent la Vie
Ils font apparaître les fils qui relient toutes les choses entre elles
Et ça leur donne le courage de tout affronter
Même la Kolyma
En attendant moi quoi ?
Moi j'ai rien vu rien lu rien entendu et surtout rien compris
Mais c'est pas grave je t’attends tant pis
La parole comme vaccin contre la mort
La parole comme rempart contre l’ennui
Parler parler encore
Parler pour affronter la Nuit





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