La Fondation Hirondelle lance un cri d’alarme sur l’indispensable
information des populations en Centrafrique.
Paradoxe : alors
que le monde commence à savoir ce qui se passe en Centrafrique, beaucoup de Centrafricains
l’ignorent. Si la République Centrafricaine fait depuis le 5 décembre les
grands titres des medias internationaux, en dehors deBangui,les Centrafricains
de l’intérieur du pays, premières victimes mais aussi acteurs des violences
interreligieuses, manquent d’une information crédible,pourtant si indispensable
dans cette période mouvante et incertaine.Radio Ndeke Luka,Radio centrafricaine, se bat courageusement pour
produire et diffuser cette information. Elle a besoin de vous.
Certes les Banguissois peuvent écouter RFI qui rend compte de la
situation sécuritaire, militaire et humanitaire, mais ces informations sont
inclusesdans un programme dédié à l’ensemble des auditeurs africains. Seule
Radio NdekeLuka propose aujourd’hui et ce, tout au long de la journée, des
informations concrètes, pratiques et fiables en français et en sango à
l’attention des populations de la capitale, de Bouar et, depuis le 19 décembre,
de la région de Bambari. Elle réussit aussi à diffuser sur ondes courtes deux
heures par jours sans bien savoir si les auditeurs de l’intérieur du pays
peuvent recevoir ses programmes. Toutes les radios communautaires ont été
pillées lors de la rébellion de mars 2013 et sont muettes depuis lors.
Or, au plus fort de la crise du début du mois
de décembre, Radio NdekeLuka n’a pu émettre pendant trois jours, laissant ses
auditeurs mais aussi ses journalistes, désemparés.
Radio NdekeLuka est la radio de référence en
Centrafrique. 80% des citoyens de Bangui l’écoutent tous les jours. Ce statut
lui a valu au cours des dix dernières années d’être la cible de tous les
pouvoirs. Ces derniers mois elle a été victime de vols mais surtout
d’intimidations et de menaces directes sur ses journalistes. Plusieurs d’entre
eux se sont retrouvés à genoux, le canon d’une arme à feu pointée sur la base
du crâne. Malgré ces menaces, le couvre-feu et la crainte des exactions, l’équipe
de Radio NdekeLuka a repris le travail, la peur au ventre mais avec un courage et un professionnalisme
exemplaire. Tous les jours les journalistes informent, en direct des différents
quartiers de Bangui, la population sur l’évolution de la situation. Les
citoyens de toutes sensibilités politiques ou religieuses peuvent désormais
(re)prendre la parole et… « s’entendre ». Des débats qui rassemblent
des représentants de la société civile et des ONGs sont aussi organisés et
diffusés quotidiennement. L’antenne est ouverte aux messages de réconciliation
et de salutationsaux familles.
Ce travail, si essentiel au dialogue entre les
communautés et entre tous les Centrafricains, va pouvoir se faire aussi à
Bambari depuis qu’une équipe de la radio, bravant l’incertitude du voyage, a
réussi à remettre en fonctionnement l’émetteur de la préfecture de la Ouaka qui
avait été endommagé au mois de mars 2013 par les rebelles.
Mais la grande majorité des Centrafricains n’a
aucun moyen d’être informée de la situation de lepays. L’absence de medias dans
la plupart des régions laisse la rumeur et la propagande faire leur sinistre
besogne. Elles alimentent et exacerbent les haines intercommunautaires.
La Fondation Hirondelle, éditeur de Radio NdekeLuka, lance un cri d’alarme
aux medias internationaux qui couvrent les événements tragiques que vit la
République Centrafricaine, et à la communauté internationale.
La RCA est un pays à terre. Ses habitants,
victimes des pillages successifs, n’ont plus que leur vie à préserver. L’engrenage
de la vengeance individuelle et communautaire est en marche. Des pauvres
s’approprient les maigres biens d’autres pauvres. La violence s’alimente des
rumeurs. Les journalistes ont peur ! Ils ont besoin qu’on fasse état de
leur travail et des conditions dans lesquelles ils l’effectuent. En parler dans
la presse étrangère peut être protecteur et salvateur.
Obtenir les moyens de couvrir la totalité du
territoire est également crucial. Les Centrafricains ont le droit de savoir ce
qui se passe dans leur propre pays. Il est indispensable qu’ils puissent, sur
la base d’informations vérifiées et crédibles, se parler, dialoguer et
envisager les voies à emprunter pour revivre ensemble.
Radio NdekeLuka et ses radios locales
partenaires, malgré un incontestable succès d’audience, se bat chaque année
pour subsister. Preuve, par l’absurde, que les intérêts des puissances
économiques sont actuellement bien faibles en Centrafrique.
Oui ! L’information des populations de
l’intérieur du pays est un enjeu majeur de la résolution de la crise actuelle
autant que la présence de troupes de pacification.
Les journalistes de Radio NdekeLuka et ceux de la Fondation Hirondelle se tiennent à votre
disposition pour témoigner et vous donner toute précision qui vous serait utile
sur la nature de leur travail et sur la situation sur le terrain.
Yves Laplume
Délégué Editorial
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