18/09/2014

NIGERIA : Ce soir sur RFI : Interview de Geneviève Garrigos, présidente d'Amnesty International France, sur l'usage de la torture dans l'armée nigériane


Les policiers et les militaires nigérians torturent couramment des hommes, des femmes et des adolescents – parfois âgés de seulement 12 ans – c'est ce que démonter encore un rapport, celui d'Amnesty International, publié ce jeudi (18 septembre).

L'armée et la police nigérianes on régulièrement recours à diverses méthodes telles que les coups, les blessures par balle et le viol, selon ce nouveau rapport intitulé « Bienvenue en enfer ». Il détaille les opérations « coups de filet » au cours desquelles des personnes sont arrêtées puis torturées à titre punitif ou pour leur extorquer de l'argent ou leur arracher des « aveux » dans le but de « résoudre » plus rapidement les affaires.

Geneviève Garrigos est la présidente d'Amnesty International France. Elle détaillera les conclusions de ce rapport et les recommandations d'Amnesty, dans Afrique Soir sur RFI, à 20h30 heure de Paris, 18h30 TU, au micro de Mélissa Chemam.


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AMNESTY INTERNATIONAL
COMMUNIQUÉ DE PRESSE

AILRC-FR
Sous embargo jusqu'au jeudi 18 septembre 2014

           Nigeria. La torture dénoncée dans un nouveau rapport

Les policiers et les militaires nigérians torturent couramment des hommes,
des femmes et des adolescents – parfois âgés de seulement 12 ans – au moyen
de diverses méthodes telles que les coups, les blessures par balle et le
viol, écrit Amnesty International dans un nouveau rapport rendu public
jeudi 18 septembre 2014.


Intitulé « Bienvenue en enfer ». Torture et mauvais traitements au Nigeria,
ce rapport détaille les opérations « coups de filet » au cours desquelles
des personnes sont arrêtées puis torturées à titre punitif ou pour leur
extorquer de l'argent ou leur arracher des « aveux » dans le but de «
résoudre » plus vite les affaires.


« Ces pratiques vont bien au-delà des tortures et des homicides dont sont
victimes les membres présumés de Boko Haram. Dans tout le pays, l'ampleur
et la gravité des tortures infligées aux hommes, femmes et enfants
nigérians par les autorités censées les protéger sont insoutenables même
pour les observateurs des droits humains les plus endurcis », a déclaré
Netsanet Belay, directeur de la recherche et du travail de plaidoyer à
Amnesty International.


« La torture n'est pas considérée comme un crime aux termes du droit
nigérian. Le Parlement de ce pays doit immédiatement adopter une loi
érigeant la torture en infraction. Cette mesure est attendue de longue date
et rien ne saurait justifier un nouveau retard. »


Rédigé à partir de centaines de témoignages et d'éléments de preuve
recueillis pendant 10 ans, le rapport d'Amnesty International dénonce
l'institutionnalisation du recours à la torture au sein de la police et les
violences systématiques commises par l'armée dans un pays dont la
Constitution interdit la torture mais qui n'a toujours pas adopté de
législation prohibant cette pratique.


Ce rapport révèle aussi que la plupart des personnes arrêtées sont détenues
au secret – sans contact avec l'extérieur, que ce soit avec leurs avocats,
leurs familles ou les instances judiciaires.


La torture fait tellement partie du système de maintien de l'ordre au
Nigeria que de nombreux postes de police disposent d'un agent
officieusement désigné comme « chargé de torture ». L'éventail des
techniques utilisées est effrayant et comprend notamment l'arrachage
d'ongles ou de dents, la suffocation, les décharges électriques et les
violences sexuelles.


Par exemple, Abosede, âgée de 24 ans, a raconté à Amnesty International les
méthodes révoltantes de la police, qui ont provoqué chez elle des lésions
permanentes :


« Une policière m'a emmenée dans une petite pièce et m'a ordonné de me
déshabiller. Elle m'a écarté les jambes et m'a tiré du gaz lacrymogène dans
le vagin […] Ils voulaient me faire avouer que j'avais commis un vol à main
armée […] Je saignais […] Aujourd'hui encore, je souffre de douleurs dans
l'utérus. »


L'armée nigériane se rend elle aussi coupable de violations des droits
humains du même type et procède à des milliers d'arrestations dans le cadre
de ses opérations de recherche de membres de Boko Haram.


Mahmood, un jeune garçon de 15 ans vivant dans l'État de Yobe, a été arrêté
par des soldats avec une cinquantaine d'autres personnes, principalement
des garçons âgés de 13 à 19 ans. Il a raconté à Amnesty International que
les militaires l'avaient gardé en détention pendant trois semaines,
l'avaient frappé à maintes reprises à coups de crosse, de matraque et de
machette, lui avaient versé du plastique fondu sur le dos, l'avaient fait
marcher ou rouler sur des tessons de bouteille et l'avaient contraint à
assister aux exécutions extrajudiciaires d'autres détenus. Il a finalement
été libéré en avril 2013.


Dans l'État de Yobe, des soldats ont même arrêté et frappé un garçon de 12
ans ; ils lui ont versé de l'alcool dessus, l'ont forcé à nettoyer du vomi
à mains nues et l'ont piétiné.


« Les soldats arrêtent des centaines de personnes, cherchant celles qui ont
des liens avec Boko Haram, puis torturent les suspects durant un processus
de « tri » qui ressemble à une chasse aux sorcières du Moyen-Âge », a
déclaré Netsanet Belay.


« L'ampleur de la torture s'explique en partie par le fait que personne, y
compris dans la hiérarchie, n'est tenu de rendre compte de ses actes. Le
Nigeria doit changer radicalement de manière de procéder ; il doit
suspendre de leurs fonctions tous les agents contre lesquels il existe des
allégations crédibles de torture, enquêter de manière approfondie sur ces
allégations et veiller à ce que les tortionnaires présumés soient traduits
en justice. »


Dans la plupart des cas d'allégations de torture aux mains de forces de
sécurité qu'Amnesty International a étudiés, aucune enquête satisfaisante
n'a été menée et rien n'a été fait pour poursuivre en justice les auteurs
présumés.


Lorsque des enquêtes internes à la police ou à l'armée sont effectivement
ouvertes, leurs conclusions ne sont pas rendues publiques et leurs
recommandations sont rarement suivies. Sur les centaines de cas examinés
par Amnesty International, aucune victime de torture ou d'autres mauvais
traitements n'a reçu une indemnisation ni aucune autre forme de réparation
de la part de l'État nigérian.


Le gouvernement du Nigeria est conscient du problème et a créé, au cours de
ces 10 dernières années, au moins cinq commissions présidentielles et
groupes de travail sur la réforme du système judiciaire et l'éradication de
la torture. Toutefois, la mise en œuvre des recommandations qui en ont
découlé est d'une lenteur désespérante.


« Le message que nous adressons aujourd'hui aux autorités nigérianes est
clair : ériger la torture en infraction, mettre un terme à la détention au
secret et enquêter pleinement sur les allégations de violences », a déclaré
Netsanet Belay.


« Ce serait un premier pas important vers la fin de cette pratique odieuse.
Il est grand temps que les autorités nigérianes prouvent qu'elles peuvent
être prises au sérieux à ce sujet. »

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AMNESTY INTERNATIONAL
FAITS ET CHIFFRES

AILRC-FR

Nigeria. Le double discours sur la torture
Bien que le Nigeria interdise la torture et les autres mauvais traitements dans sa Constitution et que le pays ait ratifié de nombreux instruments internationaux relatifs aux droits humains qui prohibent cette pratique, les autorités continuent de fermer les yeux sur la torture et ne l'ont pas érigée en infraction dans le droit national. Les Faits et chiffres ci-dessous donnent une idée de l'ampleur du problème et de l'inaction durable du gouvernement.
La torture en chiffres
5 000  nombre minimum estimé de personnes ayant été incarcérées depuis 2009 (début des opérations militaires contre le groupe armé Boko Haram), dont beaucoup ont subi des actes de torture et d'autres mauvais traitements
500 – nombre d'entretiens réalisés par Amnesty International avec des victimes de la torture, des détenus, leurs proches, des défenseurs des droits humains et des avocats pendant ses recherches
20  – nombre de missions de recherche d'Amnesty International au Nigeria sur lesquelles s'appuie ce rapport
12 – nombre de méthodes courantes de torture recensées dans le rapport d'Amnesty International
7 – nombre d'années écoulées depuis que le rapporteur spécial des Nations unies contre la torture a conclu que la torture était « intrinsèquement liée au mode de fonctionnement de la police au Nigeria » et a recommandé qu'elle soit érigée en infraction
7 – nombre d'instruments internationaux interdisant la torture auxquels le Nigeria est partie et qu'il n'applique pas
2 – nombre d'années depuis lesquelles une loi érigeant la torture en infraction est en attente d'examen devant le Parlement nigérian
1 – nombre, dans certains postes de police nigérians, d'agents officieusement responsables de la torture, connus sous le nom de « chargés de torture »

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